Paris, 3 octobre (EFE).- Marc Chagall a peint la coupole de l'Opéra Garnier de Paris en 1962 alors qu'il écoutait Mozart et n'a pas gagné un centime pour cette œuvre colossale. Une nouvelle exposition présentée au Centre Pompidou sur l'artiste franco-russe dévoile les coulisses de cette magnifique œuvre grâce à un récent don de ses deux petites-filles.
Si « Chagall à l'œuvre, Dessins, céramiques et Sculptures (1945-1970) » couvre d'autres thèmes et épisodes de la vie de l'artiste, le « making-of » des fresques de l'Opéra Garnier joue un rôle prédominant.
Une bonne partie de la centaine de croquis et maquettes exposés depuis ce mercredi jusqu'en février 2024 décrivent la conception de ces fresques emblématiques, et proposent au spectateur une réflexion sur le processus de leur création artistique.
"Quand il a peint la coupole de l'Opéra, nous savons qu'il écoutait de la musique et il dit lui-même qu'il a écouté Mozart pendant tout ce travail", explique Anne Montfort, l'une des commissaires de l'exposition, à EFE.
Mélomane et violoniste, Chagall (1887-1985) avait besoin de musique pour pouvoir créer.
"Il concevait son œuvre en termes de rythme musical, il voyait les sons en couleurs", raconte Montfort, en faisant référence à la série d'esquisses et d'esquisses dans lesquelles l'artiste joue d'abord avec les couleurs, avant de passer au choix des figures.
Un choix conditionné - selon la commissaire - par les marques laissées sur elle par sa culture juive et ses origines russes (reflétées, par exemple, dans les formes des poupées Katchina).
Dans le cas des fresques de l'Opéra Garnier, l'exposition met en évidence le bouleversement social que le ministre de la Culture de l'époque, l'écrivain et intellectuel André Malraux, a provoqué en commandant les fresques d'un édifice du XIXe siècle à un peintre moderne.
"Les critiques s'adressaient avant tout à Malraux. Ce qu'on reprochait à Chagall, c'était d'être moderne. Celui qui critiquait le plus, c'était la presse conservatrice", explique Montfort.
En raison de la notoriété que lui ont conférée ces fresques, le peintre russe d'origine juive a également été la cible d'insultes antisémites et d'un certain préjugé dû à son âge. Il avait 75 ans lorsqu'il a peint le dôme.
"A cette époque les critiques étaient aussi virulentes que ce qu'on voit aujourd'hui sur les réseaux", prévient-il.
En réponse à ceux qui affirmaient alors que Chagall gagnait beaucoup d'argent pour les fresques, le conservateur révèle également qu'en réalité il n'était pas rémunéré. "Il a seulement demandé à être remboursé du matériel utilisé", affirme-t-il.
L'exposition, qui a vu le jour grâce au don des deux petites-filles de Chagall, Bella et Meret Meyer, comprend également cinq céramiques, sept sculptures, ainsi que des croquis des robes et rideaux du ballet "L'Oiseau de feu" d'Igor. Stravinsky, joué en 1945 au Ballet Theatre de New York.